La quête de la guitare de Perro
Perro est quelqu’un qui sait très bien ce qu’il veut. Même s’il n’a pas encore établi de « plan d’attaque » détaillé, il sait déjà que la solution, sa solution, est de se faire fabriquer une guitare sur mesure. Elle devra compiler tout ce qu’il aime en sacrifiant le moins possible. Perro a une idée précise : il aime les Gibson Les Paul, mais la marque a vu sa qualité baisser à cette époque, tandis que les prix, eux, n’ont pas suivi la même tendance.
On oublie souvent qu’une guitare de luthier ne coûte pas toujours plus cher qu’un modèle Custom Shop d’une grande marque, tout en offrant ce supplément d’âme que l’on ne trouve pas en magasin. C’est précisément ce qu’il va venir chercher auprès de Valentin Novo, Luthier à Belfort.
Perro découvre Novo sur instagram, où il voit passer ses créations. Il est immédiatement intrigué : le style lui plaît, « elles étaient chouettes ». Il apprendra par la suite une anecdote folle : l’audace du luthier, qui, au Stade de France, lors d’un concert des Guns N’ Roses, décide d’offrir une guitare unique à double manche confectionnée dans son atelier, à Slash, le guitariste star du groupe. Cette histoire ne fera que renforcer la confiance qui s’installe peu à peu dans l’esprit de Perro à l’égard de Novo.
Un premier contact est établi par téléphone. Le courant passe bien, ils aiment tous les deux le rock et le metal, et partagent un mode de vie « au calme », loin des diktats de la société, plus libres.
Valentin Novo est un virtuose du skate, et un génie de la lutherie. Derrière son look metal de personnage anti-système, suivant ses propres règles et principes de vie, ce barbu aux cheveux longs, tatoué et percé nous invite dans son univers décalé, où il imagine ses créations les plus folles.
Il faut alors partir d’une base pour imaginer la guitare parfaite. Cette base ce sera la Gibson Les Paul. Ils affinent ensemble les critères choisissent finalement le modèle Les Paul 1959 comme référence. Une guitare qui a fait ses preuves entre les mains des meilleurs guitaristes, avec une identité résolument Rock. Il faut savoir que Perro a passé son adolescence à écouter et admirer des guitaristes comme Slash. Par la suite, il se tourne vers le metal progressif en découvrant Tool. Cette découverte est une énorme claque pour lui, et le jeu d’Adam Jones, ainsi que son son, deviennent des modèles.
L’électronique et surtout les micros vont refléter cette double influence. La configuration est hybride : un P90 en position manche pour la chaleur reconnaissable du rock, et en chevalet un double bobinage SP Custom, copie d’un Seymour Duncan DDJ pour un son puissant et tranchant.
Côté esthétique, Perro réalise lui même un montage Photoshop « franchement douteux », il l’avoue sans problème, combinant une Les Paul 59 et une guitare Wylde Audio de Zakk Wylde, dont il souhaite emprunter la « forme de corne » du pan coupé, plus étrange et agressive que l’arrondi classique. Cela donne une idée des formes de la guitare finale. Novo propose l’idée d’un manche traversant et d’une touche en ébène ce qui alourdit considérablement la guitare. Au final l’instrument pèse 5,4 kg, mais chacun de ces choix contribue à accentuer le « sustain » essentiel au jeu de Perro. Cherchant une guitare au look « psychédélique », Novo le dirige vers L’Yote Brush artiste spécialisé dans ce type de peintures. L’artiste crée alors un design unique, avec des champignons chantants, des spermatozoïdes fécondant des ovules. L’ensemble est « surveillé » tel le sommet d’un totem par un oeil illustré sur la tête.
A chaque étape de l’avancement de la guitare, Novo tient Perro informé, lui envoyant régulièrement des photos, des vidéos et autres commentaires. Vers la fin de la fabrication il envoie même ces photos à Slash, avec qui il a gardé un bon contact, pour lui montrer la guitare en cours de réalisation. Perro, de plus en plus excité, attend impatiemment de l’avoir entre les mains. Jusqu’à la délivrance finale, il récupère la guitare et ne la lachera plus jamais.
Au final la guitare de Perro est un objet singulier, qui n’est pas fait pour tout le monde, mais lui correspond parfaitement. Il continue de l’améliorer, petite touches par petites touches, en ajoutant des éléments qui correspondent à son jeu. Par exemple, le « détuner » sur la corde de mi grave lui permet facilement de switcher d’un accordage en mi à un drop D, transformant le mi grave en Ré. Cet accordage est devenu essentiel dans ses compositions avec Luma Project.
Compte tenu du poids considérable de la guitare, Perro a déjà vécu quelques frayeurs, notamment lors d’un tremplin dans les Landes, où la sangle s’est détachée en plein milieu d’un morceau. Il a réussi à rattraper in extremis l’instrument avant qu’il ne touche le sol. Au-delà de cette expérience particulière, Perro a plusieurs fois envisagé de faire creuser la guitare pour en faire une semi-hollow, et ainsi la rendre plus légère et encore plus unique. Ce n’est pas pour tout de suite, mais l’idée est lancée…